
Prologue au plaisir.
On parle souvent de temps du thé, celui de la dégustation ; de l’après thé, tenue en bouche, sommeil léger.
Mais on parle peu de l’avant thé.
De plus en plus pourtant, je pense que la préparation du palais joue un rôle déterminant dans la réussite de la dégustation.
J’ai pensé me faire une petite liste d’aliments qui ruinent une dégustation à venir.
Certains font ressortir les défauts d’un thé, d’autres masquent ses qualités.
Vous avez sans doute déjà élaboré votre liste d’interdits afin de préserver vos dégustations.
Je citerai juste quelques exemples pour que mon propos soit plus clair.
Les Dan Cong bien préparés ne sont pas dramatiquement amers mais il faut être attentif à leur préparation et les rencontrer avec le palais vierge de certains mets qui ont tendance à exciter leur caractère. Evitez les agrumes, la pâte d’amande et le gingembre.
De manière générale, si vous ne pouvez pas espacer le dernier repas et la dégustation de thé d’au moins deux heures, abstenez-vous de dessert.
La dégustation est moins raide après des mets salés que sucrés, lesquels rendent agressifs presque tous les thés.
Dans mes premières années de dégustateur sérieux, j’aimais bien manger japonais (sushi, Chirashi, etc..) avant le Pu Er.
Puis, je me suis rendu compte qu’il s’agissait d’une erreur.
La sauce soja contient trop de sucre et de sel et masque les saveurs.
La soif est décuplée artificiellement mais la dégustation est trop imprécise.
Le poisson blanc et les légumes vapeur ne font pas trop de dégats.
Préalablement à une dégustation de grande classe, je préconise de manger du pain avec éventuellement un peu de beurre. C’est tout.
Fuyez le pain aux noix, et autres fruits secs. Les olives sont également nuisibles. Tout comme les abricots secs, apporteurs de sucre.
Un très bon pain peut constituer un savoureux repas assez neutre pour préserver toutes les qualités de votre thé.
Evitez toutefois les pains spéciaux comme ceux réalisés à partir de farine de seigle ainsi que les multi céréales trop puissants en goût.
J’ai de bonnes expériences avec le levain naturel. Son acidité éveille les papilles sans trop plomber la bouche.
On peut le faire griller pour agrémenter un peu le repas mais il y a un petit risque de masquer les saveurs pâtissières des Rocher, par exemple.
Pas de risque avec un Pu Er, en revanche.
Pour la boisson, de l’eau, de l’eau et rien que de l’eau. Le vin, c’est la cata, sans parler de l’effet de l’alcool qui abaisse le niveau d’attention.
Dois-je préciser que le café assassine le thé ?
Enfin, déjà évoqués les fruits, bien que légers, font trop de concurrence au thé et sont à fuir avant les wulong et même les Pu Er compte tenu de leur apport en sucre et de leur acidité.
Un peu austère, comme propos, me direz-vous.
Pourtant, si vous vous apprêtez à vous rendre dans votre salon de thé préféré et claquer l’équivalent d’un repas au restaurant pour déguster un thé pendant deux heures, il serait dommage de gâcher la fête, n’est-ce pas ?