27 février 2007


S'il n'en restait qu'une...


Il en est des objets comme des personnes: la fascination qu'ils exercent parfois sur nous n'est pas toujours rationnelle.

Il y a entre moi et cette théière un "je ne sais quoi" de pas très raisonnable.

A l'heure du choix, c'est presque toujours elle qui gagne sa place à la table de dégustation.

Elle puise à merveille dans les arcanes des Pu Er anciens, en dévoile les souvenirs les plus lointains, s'adresse aux jeunes avec compassion, flatte leur vigueur tout en en civilisant leur discours.

En partenaire fidèle, elle est une main tendue et toujours disponible pour un voyage dans le temps.

Comme un juste retour des choses, le Pu Er est redécouvert par la Chine, s’invite à la table de la nouvelle bourgeoisie locale, sort de la confidence et goûte à la dure loi de l’offre et de la demande.

Le dégustateur privilégié jusqu’alors, qu’il vienne d’Orient ou d’Occident voit son loisir quotidien brutalement élevé au rang d’exception.

Le Pu Er retrouve sa noblesse en raison de la rareté de l’offre de qualité et de l’effort financier qu’il suppose dorénavant.

Le regard du dégustateur sur sa collection change irrémédiablement. La main plongée dans la cave à thé hésite, reste suspendue, comme saisie d’effroi puis épargne de plus en plus souvent les précieuses et rares galettes anciennes.

Le dégustateur se créé des évènements pour célébrer ses crus les plus nobles.

Il porte un regard différent sur ses références, inspecte, compte, liste, répertorie, vérifie ses stocks.

Le Pu Er s’est vengé d’avoir été traité comme une boisson et rappelle à nos consciences qu’il est un trésor.